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Les révoltés de l'arrêt de bus

Les révélations se faisant attendre, on va classer les aventures des Bleus au rayon comédie de seconde zone, plutôt que dans la section horreur ou films de guerre...
Auteur : Jérôme Latta le 1 Juil 2010

 

Finalement, pas de déballage, plutôt un déballonnage. Oubliées, les promesses de révélations, évanouis, les regards lourds de sous-entendus. "Je parlerai très bientôt, ne vous inquiétez pas" (Thierry Henry en zone mixte après France-Afrique du Sud). "Les Français ont besoin de savoir la vérité" (Patrice Évra, même lieu, même moment). En compagnie d'Éric Abidal et de Florent Malouda, ces cadres présumés ont mobilisé le planning télévisuel de vendredi dernier, pour ce qu'on croyait être des révélations. Ils avaient été en quelque sorte devancés par Franck Ribéry, auteur d'un solo improvisé lors du Téléfoot de dimanche. Si le Munichois a été confus, les autres sont restés opaques.
De toutes ces interventions, il n'est en effet rien ressorti pour alimenter la chronique ou faire rebondir l'affaire. Un discours lisse, des affirmations connues ("le groupe a bien vécu" – Éric Abidal, involontairement ironique), des regrets de circonstance. La déception est de taille: on pensait avoir brisé le verrou de l'hôtel Pezula, mais il résiste encore.


L'option du drame

Alors? On ne voit plus que deux explications au mystère. La première est que les joueurs, après réflexion ou concertation, ont finalement décidé de refermer cette porte imprudemment ouverte sur le "secret du vestiaire". Une façon d'enterrer la vérité sur Le Cauchemar de Knysna, dont les terribles intrigues ne seront jamais résolues et les sordides détails jamais révélés.

Cette hypothèse a évidemment les faveurs de tous ceux, majoritaires, qui ont dramatisé l'événement à l'extrême, et ne veulent pas le voir retomber comme un soufflé. L'Équipe, qui a fait éclater l'affaire de si spectaculaire façon. Les consultants, qui ont beaucoup gesticulé et qui réclament "la vérité". Les médias en général, qui aimeraient faire toute la Coupe du monde avec les déboires des Bleus, à défaut de pouvoir narrer leurs exploits sportifs. Les philosophes de télévision et les penseurs de première page qui ont instrumentalisé le psychodrame en lui accordant de grandes vertus explicatives sur l'état de la société – du football français – de la Fédération (rayez la mention inutile). Et puis notre classe politique, pas moins ridicule que les accusés, de convocation à l'Élysée de l'ex-capitaine en audiences parlementaires, en passant par le lancement d'états généraux du football et une ingérence périlleuse dans les affaires fédérales...

À leurs yeux, "ceux qui ont parlé sont ceux que l'on suspectait d'être les meneurs. Ils ont tout fait pour le confirmer, par l'insupportable réécriture du chapitre le plus scandaleux de l'histoire de l'équipe de France" (Vincent Duluc). Bixente Lizarazu a déjà les noms des gentils (1), maintenant il veut connaître ceux des "leaders mal intentionnés qui ont très mal jugé la situation et envoyé toute l'équipe de France dans le mur". Avec Robert Pires, il lance un appel à témoignages, dans l'intérêt supérieur de Laurent Blanc (2).

cauchemar_4.jpg


Une sitcom qui dégénère

L'explication d'un groupe sous l'emprise d'une junte de caporaux (ou de "caïds immatures terrorisant des collégiens apeurés", selon les termes de Roselyne Bachelot) est tentante. On s'est tellement indigné que quelqu'un doit payer. On aurait l'air fin, s'il n'y avait pas grand-chose derrière tout cela. Il faut des coupables, des vilains, Anelka n'y suffisant pas.
Car la deuxième explication est bien moins spectaculaire: sous l'effet de l'affaiblissement du sélectionneur et de doutes sportifs croissants, les tensions se sont développées et un incident à double détente a fait détoner le mélange. Emportés par leur immaturité et leur égoïsme, et par l'irresponsabilité de leurs leaders, ils se sont ensuite précipités dans une incroyable série de décisions imbéciles dont ils n'ont saisi ni l'ampleur ni le sens qu'elles prendraient à l'extérieur. Un concours de sottise s'est déroulé au sein d'une équipe littéralement écervelée, qui a cru retrouver une solidarité de façade en la mettant au service d'une très mauvaise cause.

On doute donc franchement que les uns aient terrorisé les autres ou que Yoann Gourcuff ait "vécu un enfer", comme le suggérait TF1 mardi soir. Le "cauchemar", c'est l'impasse dans laquelle les joueurs se sont plongés eux-mêmes. Au mieux, il y a là le scénario d'une comédie façon 7e Compagnie, mais les protagonistes n'ont réussi qu'à offrir une suite plutôt sinistre au Blog de Raymond.
Revenus à la civilisation, les joueurs ont probablement touché du doigt l'inanité de leur révolte et de leur comportement, mesuré le gouffre les séparant de l'opinion générale et pris conscience du surcroît de ridicule dont ils s'affligeraient en étalant leurs turpitudes. Point de "pacte du silence" là-dessous, juste un éclair de lucidité.


Au milieu des indignations et des vendettas qu'elle a suscitées, la morale de cette farce dérisoire est difficile à trouver (3), et l'on ne voit pas quelles révélations fracassantes pourraient encore en sortir, en dehors de la peu excitante liste des meneurs. L'aventure a surtout confirmé les extrémités que peuvent atteindre, à la faveur d'un casting particulièrement fatal, un assemblage de footballeurs contemporains livrés à eux-mêmes.


(1) "Moi j'aimerais entendre l'avis de joueurs importants comme Hugo Lloris, Jérémy Toulalan, Yoann Gourcuff, Alou Diarra, des joueurs en qui j'ai totalement confiance sur le plan de la mentalité".
(2) Lizarazu : "C'est pas du déballage que je souhaite, c'est simplement tirer les enseignements de ce qui s'est passé en 2010 pour construire une équipe de qualité". Pires: "Ce qui serait bien c'est que les autres s'expriment. C'est pas parce qu'il vont parler qu'ils vont être sanctionnés par Laurent Blanc. Le plus important c'est que demain Laurent Blanc sache un petit peu ce qui s'est passé dans le bus et visiblement maintenant dans l'avion".
(3) On pourrait retenir la légende inversée d'Anelka, l'homme qui sème la discorde et le scandale presque partout où il passe, et qui a tenu à démontrer ce qu'il fallait attendre de lui en phase finale de Coupe du monde. L'incarnation presque trop parfaite de l'indifférence foncière de certains internationaux envers la sélection, réduite à un outil de valorisation personnelle, l'archétype du footballeur jamais responsable de ses actes... Qu'il ait pu, après son départ, susciter la mobilisation de ses coéquipiers parachève la consternation.



La mi-temps de France-Mexique
Un battement de lèvres dans un vestiaire sud-africain a provoqué un raz-de-marée en France... L'étincelle qui a déclenché l'explosion médiatique n'est toutefois pas anodine. Que ce serait-il passé sans la fuite? À la pause de France-Mexique, rien n'est perdu. Nicolas Anelka insulte Raymond Domenech à mi-voix, qui décide de le remplacer. L'incident n'a pu que favoriser la défaite à venir et rétrospectivement, il marque le tournant de l'histoire telle qu'elle sera racontée. L'attitude du sélectionneur accrédite cette thèse: il revient seul sur le terrain, l'air commotionné, et dit pour lui-même: "C'est incroyable", comme s'il n'en revenait pas de se voir trahi par le joueur auquel il a accordé une confiance si inconsidérée. En conférence de presse, il est encore sonné. On ne le reconnaît plus, et jusqu'à la fin il affichera une forme de détachement ou de résignation totalement inédite chez lui.

cauchemar_1.jpg

Reste à savoir si ces insultes de vestiaire n'étaient qu'un épiphénomène que le groupe aurait digéré en interne, ou s'il témoignait plus profondément de la dissolution de Domenech et de l'incapacité préalable de ces joueurs à développer une intelligence collective sur le terrain et en dehors. En affichant les termes (présumés) d'Anelka dans toute leur vigueur ordurière, L'Équipe a clairement pris le second parti, ainsi que la responsabilité de précipiter l'échec final du troisième match. On ne saura jamais si les dés étaient déjà jetés, ou s'ils ne l'ont été qu'après cette une qui revenait à placer un détonateur sur une bonbonne de gaz – alors qu'une victoire large contre l'Afrique du Sud était encore envisageable... Mais, cette équipe ayant par la suite fait la démonstration de ses abyssales faiblesses mentales et de sa médiocrité footballistique, il est de toute façon difficile d'imaginer une autre issue que cette sortie prématurée.

Réactions

  • RabbiJacob le 01/07/2010 à 09h45
    Vous êtes marrants aux cahiers du football. Je voudrais vous y voir à devoir remplir un journal en papier tous les jours ou bien à animer des heures de magazines télé quotidiens avec des anciens footballeurs comme consultants.

    Vous croyez que c'est avec des articles sur George Best ou St. Pauli qu'on va relancer la presse, sortir de la crise et ne pas devenir un pays du tiers monde comme la Grèce ?


  • LMD le 01/07/2010 à 09h49
    Plutôt d'accord avec l'équipe. Etonnant la façon qu'a Pirés de penser que si les joueurs doivent informer Laurent Blanc, c'est forcément par voie de presse, comme si un autre mode de communication n'existait pas.

    Cependant je trouve une légère tendance à vouloir "diaboliser" (le mot est un peu fort) Anelka qui me semble un peu déplacée vu le reste de l'article: pas de meneur mais bien un homme problématique par qui le mal arrive. Il est indéniable qu'il à toujours exprimé un tempérament étrange, autiste ou égoïste, durant sa carrière, qui n'en font probablement pas le plus doué pour s'intégrer à un groupe. Et que sur le terrain il n'a pas produit ce qui était attendu. Mais si la version avancée par Domenech est vrai (il a grommelé ses critiques dans son coin) alors le renvoi en avion était complètement disproportionné (et conséquence de la simple inflation médiatique) et il était logique que le "groupe" se cabre.

  • LMD le 01/07/2010 à 09h50
    Mes aïeux quel labsus!
    Plutôt d'accord avec l'article.
    Je ne lis pas l'Equipe. Je vous jure.

  • Monsieur Jo le 01/07/2010 à 09h51
    "le groupe a bien vécu"

    Ce qui me rappelle l'execution de Catilina et de ses complices. Pour l'annoncer à la foule inquiète qui venait s'informer et ne savait pas ce qui s'était passé, Cicéron leur dit simplement "ils ont vécu".

    Sinon, de l'audition de Domenech par les députés, il semblerait que les propos tenus aient été pires que ceux qui ont été retranscrits par l'Equipe.

  • le Bleu le 01/07/2010 à 10h07
    Quand les gens intelligents, sensés et pondérés, c'est-à-dire Jérôme Latta et Claude Onesta (lire ses papiers sur lien ! Si, si. Ce site n'est pas forcément le Mal.) s'expriment, alors enfin, on peut respirer, prendre salutairement du recul et faire un vrai bilan, celui qui sera vraiment utile par la suite.

    Les Cahiers du Foot ont écrit l'article que je souhaitais vraiment lire. Merci les Cahiers.

  • Jean-Luc Skywalker le 01/07/2010 à 10h13
    Concernant Anelka, on pouvait avoir l'espoir qu'il gagne en maturité et en sagesse, parce qu'on est pas pareil à 22 ans et à 30 ans.

  • La parole à la défense le 01/07/2010 à 12h01
    Cette attente médiatique sur les révélations de ce qu'il s'est dit et passé dans le bus m'amuse également beaucoup. Cela me rappelle la même attente, en 2006, sur les explications de Zidane quant à son coup de boule dans le torse de Materrazzi. Je pense d'ailleurs qu'il va se passer un peu la même chose, à savoir la non-révélation des paroles échangées pour pas décevoir une attente aussi forte avec des très probables : "Ben en fait il avait traité ma mère alors j'ai fondu un plomb. Quoi ? Je suis un peu con ? Oui c'est possible !" pour Zidane et "Ben on était super énervés qu'un pote à nous se soit fait virer à cause des journalistes alors qu'il avait rien dit de trop méchant alors on s'est dit qu'on allait faire grève parce que vraiment c'était trop grave. Quoi ? On est un peu cons ? Oui c'est possible !"

    Enfin, selon moi, les médias ont mis trop de pression sur un groupe qui n'avait pas les capacités footballistiques et psychologiques pour y résister. Et la stratégie d'isolement de Domenech (qui si je me souviens bien avait été la même en 2006) a encore augmenté cette pression, les médias balançant n'importe quoi pour se venger de ne pas avoir accès directement aux joueurs.

  • magnus le 01/07/2010 à 12h27
    LMD: pour Anelka, il n'est clairement pas mentionné comme un principal responsable dans l'article, juste comme l'exemple le plus évident de la difficulté de "gérer" des joueurs qui même lors de la plus grande compétition de football sont incapables de mettre leurs états d'âme de côté, surtout quand ceux-ci découlent d'une futilité comme "je ne joue pas à mon vrai poste" - on parle pas d'un attaquant qui se retrouve défenseur quand même. Je pourrais appliquer cette remarque à Ribéry, mais depuis son passage mémorable au Real Anelka a des antécédents. Qu'il est loin le temps du Brésil '70, où les 4 de devant ne jouaient pas non plus à leur vrai poste...

    Ce que je trouve intéressant est aussi la remarque sur la confiance accordée par Domenech à Anelka. Ce dernier a été clairement blacklisté par le passé à une période où son talent, à défaut de sa mentalité (le hara-kiri médiatique quand Santini avait voulu le rappeler), était quand même digne de l'EDF. Domenech lui a redonné sa chance et en a fait progressivement un titulaire à part entière alors qu'Anelka était de moins en moins efficace devant. Au-delà des buts, il est devenu rapidement évident qu'Anelka était un poids pour le collectif de l'EDF, la médiocrité de l'animation offensive sur la période 2008-10 est pour moi clairement liée au statut de titulaire indiscutable qu'il a acquis.

  • LMD le 01/07/2010 à 13h01
    magnus
    jeudi 1 juillet 2010 - 12h27
    ---
    En relisant l'article je te donnerais raison. J'avais un peu tiqué sur le petit 3 de bas de page et le retour sur la MT de France-Mexique alors qu'il n'est pas établi et même assez improbable que ce soit le point de départ des problèmes internes (c'est le point de départ du moment le plus fort de la campagne médiatique cependant), mais l'article le dit un peu de la même façon que moi.

    Dont acte.

    Je ne nierais pas que l'homme public Anelka semble symboliser certaines dérives du monde footballistique moderne et c'est vrai qu'il avait été déjà "banni" une fois ce qui à été paradoxalement peu rappelé (ou me trompe je?).

    J'avoue cependant avoir un peu peur qu'il soit transformé en "seul vrai coupable" un peu commode pour tout le monde.

  • Tonton Danijel le 01/07/2010 à 13h30
    La parole à la défense
    jeudi 1 juillet 2010 - 12h01

    Enfin, selon moi, les médias ont mis trop de pression sur un groupe qui n'avait pas les capacités footballistiques et psychologiques pour y résister. Et la stratégie d'isolement de Domenech (qui si je me souviens bien avait été la même en 2006) a encore augmenté cette pression, les médias balançant n'importe quoi pour se venger de ne pas avoir accès directement aux joueurs.
    --------------

    Je pense que les responsabilités sont au mieux partagées (dans quel rapport? Qu'en sais-je...), et j'aime bien la métaphore du détonateur sur la bouteille de gaz.

    Concernant une expérience étrangère, j'aime bien l'ouverture de Löw qui n'hésite pas, bien qu'il n'ait très probablement pas que ça à faire, à prendre une demie-heure après chaque match (que ce soit Australie, Ghana, Angleterre ou... Serbie) pour participer au debriefing du match avec les commentateurs. Une expérience que je trouve assez intéressante car pour le coup on parle de jeu et en échangeant avec ceux qui ont suivi le match à la loupe vidéo, Löw peut aussi avoir d'autres éclairages sur des mouvements qu'il n'a pas analysé sous le même angle. Vu qu'il y retourne quel que soit le résultat, c'est que le père Löw doit y trouver son compte... (Faut dire qu'il n'est pas non plus agressé, il est vrai que j'imagine mal RayDo tenir une demie-heure face à Larqué... mais bon, Löw doit aussi avoir fixé une partie des règles pour que le jeu marche).

La revue des Cahiers du football