W comme winner
Autoportrait craché : Waldemar Kita – Redoutable coach killer, le président nantais a liquidé Raymond Domenech en huit matches. Laissons-le se défendre.
Extrait du numéro 4 de la revue des Cahiers du football (juin 2020).
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Je suis Waldemar Kita. J’ai soixante-cinq ans et je suis président-propriétaire du FC Nantes depuis 2007. Pas du FCNA, il y en a encore qui font l’erreur alors que j’ai fait enlever le "A" dès mon arrivée. J’ai tout de suite voulu imposer un certain standing dans le club, une touche de classe qui manquait.
Par exemple, on a fait un service de mototaxis "FC Nantes". On a arrêté, mais on avait fait grosse impression. J’ai fait repeindre les fresques moches des couloirs du stade. On voyait de vieux entraîneurs chauves, ce n’était pas possible. J’ai fait mettre du blanc.
J’ai fait refaire le logo du club aussi, deux fois. La première fois, on s’est inspiré de Barcelone, et la deuxième fois de la Juventus, parce que ce sont des clubs qui gagnent.
Waldemar a même réussi à faire sourire Christian. (photo FC Nantes - Arnaud Duret)
Moi-même, on peut dire que je suis un winner. Partout où je suis passé, j’ai réussi. Pourquoi le nier? Je déteste la fausse modestie: comme je l’ai dit au Parisien, le grand journal de la capitale: "Il est difficile de parler de moi-même. Souvent les gens qui ne me connaissent pas disent du mal et changent d'avis quand ils me connaissent".
Je suis comme ça. En 2014, j’ai été élu président de l’année par France Football! C’est quelque chose quand même. Jusque-là, les autres présidents m’appelaient François Pignon. Je crois que c’est un personnage de film.
Je sais que je gêne. Parce que je suis Polonais, et beaucoup de racistes anti-polonais me le reprochent. Les pseudo-supporters du club, je ne les écoute même plus. Je ne les ai jamais écoutés, d’ailleurs. Ils préféraient quand personne ne connaissait le FC Nantes! Quand il y avait encore des sièges en plastique au bord du terrain! Moi, j’ai fait mettre des sièges baquet comme au Bayern de Munich, alors qu’on était en deuxième division.
L'histoire de ma vie
On dit que j’utilise beaucoup d’entraîneurs. Quinze en treize ans [màj: dix-sept]. Mais ce n’est pas de ma faute: tous les entraîneurs veulent travailler avec moi, et après ils ne veulent plus. J’ai besoin de winners, d'entraîneurs qui ont la gagne.
Der Zakarian, il est resté cinq ans, il n’a rien gagné mais il s’est plaint de moi. Mais excusez-moi, c’est Monsieur Ranieri qui est venu après lui! Ce n'est pas le même niveau. Vous comparez le haut niveau avec un niveau qui est un petit peu inférieur. Claudio Ranieri a quand même été élu meilleur entraîneur du monde! Vous comparez une Mercedes avec une deux-chevaux, j'ai dit. Voilà.
J’ai fait venir de grands joueurs au club: Klasnic, Babovic, Gravgaard, Sigthorsson, Bammou, Limbombe, Bangoura… Celui-là d’ailleurs, si j’avais su que je n’avais pas le droit, je ne l’aurais pas pris, plutôt que d’être interdit de recrutement. "Vous pouvez me dire que je suis bon ou mauvais, que j'ai mauvais caractère, pas de problème. Mais une personne qui peut me dire que j'ai été tordu, malhonnête, ou que je me suis mal conduit, je n'en vois pas beaucoup", comme je dis toujours.
Et ça, c’est l’histoire de ma vie. Quand j’ai acheté le Lausanne-Sport, en 2001, les gens en Suisse n’étaient pas prêts. La preuve, c’est que le club a fait faillite quand je suis parti. Les gens me cherchent des poux, mais ils peuvent chercher longtemps! J’ai des cheveux magnifiques, je travaille dans l’esthétique, tout de même.
Dans les Panama Papers, ils ont cru trouver une société offshore à mon nom, domiciliée aux îles Vierges britanniques. Je leur ai dit que c'était un homonyme, que c’est un nom très connu en Asie où il y a beaucoup de Waldemar Kita – mais noirs, pas blancs. Bien sûr que j'ai dit ça, pourquoi?
En ce moment je me développe dans l’acide hyaluronique, une technologie révolutionnaire que je compte exporter en Chine. Je raccourcis peut-être les entraîneurs, mais j’allonge les pénis. C’est tellement gros que personne n’y croit. Moi, oui.
Retrouvez dans le numéro 5 de la revue des Cahiers du footnall. nos – souvent imitées, jamais égalées – chroniques.