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Darmon perd son empire

Jean-Claude Darmon est évincé de sa propre société, et c'est une page de l'histoire qui se tourne. Retour sur un destin hors normes qui a changé celui du foot français, et sur les circonstances de sa chute...

Auteur : Jamel Attal le 4 Juin 2004

 

 

Si Jean-Claude Darmon avait touché un euro à chaque fois qu'il a été présenté comme "le grand argentier du football" ou comme un "visionnaire", il serait deux fois plus riche qu'il ne l'est déjà… Mais voilà, après trois décennies de règne, il vient de perdre son titre avec la décision des actionnaires de Sportfive de le laisser sur le bord de la route. Darmon ne laissera pas dire qu'il a été "viré", puisque "seuls les incapables connaissent un tel sort", comme il l'a confié à L'Est républicain avec une certaine morgue. Le nouveau propriétaire de la société (le groupe Advent International) a en effet, comme il convient, usé du langage diplomatique en vigueur dans de telles circonstances: "Nous prenons acte de la volonté de Jean-Claude Darmon de quitter la présidence de Sportfive. Nous regrettons sa décision et rendons hommage au visionnaire qui a créé le marketing sportif, etc."

 

Le culte et le tabou

Le paradoxe est que cette information de toute première importance pour l'industrie du football passe à peu près inaperçue: bien reprise par la presse financière, elle n'a pas suscité un immense émoi dans les pages sportives. Il faut dire que l'actualité ne s'y prête pas et surtout que le statut du personnage a toujours oscillé entre le tabou (évitons de trop parler de son poids écrasant dans le milieu ou de sa fâcher avec lui) et l'éloge obligatoire (n'hésitons pas à célébrer ses immenses mérites).

 

Ainsi, Darmon a toujours été, de préférence, un sujet de fin séquence football pour le duo Moatti-Porret dans L'Équipe, tandis que la quasi-totalité de leurs confrères de la presse sportive donnait dans le journalisme de révérence pour lui rendre Des hommages convenus. Un exercice qui culminait avec l'invitation annuelle sur le plateau de Téléfoot, où les détenteurs de cartes de presse présents rivalisaient de flatteries et de hochements de tête lorsque leur hôte débitait sa vulgate pro-bizness (voir Darmon chez les nuls).

 

On ne sait pas si les coups de langues eurent pour effet d'adoucir l'épais cuir du personnage, mais le moins qu'on puisse dire est qu'il en a eu son comptant, comme tout récemment avec ce "trophée spécial" décerné à l'occasion de la cérémonie des oscars UNFP du football, à la demande de Claude Simonet et Frédéric Thiriez et "pour l'ensemble de son œuvre en direction du football français" (voir la Revue de Stress du n°7 des Cahiers). À la lumière des événements actuels, il est permis de se demander si l'hommage n'avait pas quelque chose de posthume…

 

 

 

Une trajectoire de roman

Le parcours de self-made man de Jean-Claude Darmon a tout pour enchanter les amateurs de success-story pour grands capitaines d'industrie. Brièvement boxeur et docker sur le port de Marseille, Jean-Claude Darmon — de son vrai nom Jean-Claude Zahoui (il est le neuvième enfant d'une famille juive pied-noir d'Oran) — arrive à vingt-neuf ans à Nantes où il décroche son premier gros contrat: il démarche des annonceurs pour un "Livre d'or" sur le club. On est 1970.

 

En vendant les espaces sur les maillots et les panneaux publicitaires, il gagne ensuite la confiance d'autres formations (Nîmes, Reims, Sochaux…) et s'introduit à Paris auprès du Groupement professionnel, ancêtre de la Ligue. En 1982, il est nommé directeur de la promotion de la Ligue et de la Fédération. Bénévole, il se rémunère sur le chiffre d'affaires de la société Football France Promotion fondée avec Philippe Piat, le président du syndicat des joueurs. Gros travailleur doté d'un excellent relationnel, il étend progressivement son empire sur le foot français en exploitant l'intuition brillante que ce sport va générer de plus en plus de profits et en étant au bon endroit et au bon moment. Il "invente son métier", comme il se plaît à le dire, accompagne la croissance des droits de télévision avec la naissance de Canal+ et la privatisation de TF1, et comprend le potentiel commercial de l'équipe de France, dont il commence à gérer le marketing au moment où elle commence à obtenir des résultats sportifs.

 

Sa fortune est faite et rien ne l'ébranlera, ni les soupçons d'émission de fausses factures (dans le cadre des affaires du SC Toulon) dont il sera blanchi en 1992 avec deux non-lieux, ni les rumeurs persistantes sur ses pratiques. GJCD (Groupe Jean-Claude Darmon) est introduit en bourse en 1996.

 

 

Partenaire très particulier

Il n'y aurait pas grand chose à redire à cela, tous les ingrédients de l'exemplarité de ce parcours étant réunis. Sauf que la puissance de Darmon réside profondément dans le monopole qu'il s'est assuré au sein du tout petit mais très lucratif milieu du football professionnel. Il est homme d'affaires, mais surtout homme "politique", occupant tout le terrain jusque dans les couloirs des clubs, de l'équipe de France, du Variétés Club et des instances nationales.

 

À la fois très visible et très occulte, fondé sur les réseaux et les "amitiés", le pouvoir de Darmon a été total sur les destinées du foot français. Les illustrations sont innombrables, de la nomination de Platini à la tête de la sélection en 1988 jusqu'à l'éviction de Noël Le Graët (qu'il qualifie de "communiste"), coupable de ne pas aller assez loin dans la libéralisation et surtout de l'avoir lui-même écarté de la Ligue en 1997. Il a aussi, par exemple, été l'instigateur du "Club Europe", ce fumeux groupement d'intérêts qui distribuait des millions de francs (250 par an), versés par Canal+ à une élite autoproclamée en contrepartie de droits virtuels (voir Le Club Europe à l'assaut de la Ligue et la Gazette 88).

 

Dés qu'il y a une ficelle à tirer, c'est Darmon qui la tire, puisque son pouvoir relève de son omniprésence, quel que soit le dossier, le club (de l'OM au Red Star) ou le marché concerné. Nul mieux que lui incarne la consanguinité du foot français, l'imbrication totale de ses intérêts, les passe-droits et les petits arrangements qui, tous ensemble, en font un extraordinaire vivier de profits bien partagés, quelle que soit la gabegie à laquelle il peut paradoxalement donner lieu par ailleurs.

 

 

Un requin tellement humain

Rien de contradictoire, d'ailleurs, avec l'image que l'homme se plaît à donner de lui-même et que beaucoup de ses interlocuteurs renvoient: profondément "humain", il cultive la "fidélité" et "l'amitié", la "poignée de main", la "main tendue", la "passion", la "loyauté", la "parole donnée". Le côté sulfureux du personnage et son image de requin impitoyable en affaires semblent toujours noyés par son irréductible humanité… Jean Sadoul, Claude Bez, Jean Fournet-Fayard ont tous pu en témoigner en leur temps, tout comme les membres de l'interminable liste de ses "amis".

 

Alors, la Cour des comptes pouvait bien, dans son rapport 2000, s'étonner de ses relations contractuelles très libérales avec la Fédération (absence d'appel d'offres, retenues contestables sur les contrats, erreurs dans l'exécution de ces derniers, absence d'indemnisation quand ils n'étaient pas exécutés, commissions royales…). "De toute façon, personne ne lit les rapports de la Cour des comptes", répliqua-t-il à l'époque (L'Équipe magazine, 20 avril 2002). Surtout pas les responsables du football, qui ont toujours eu à se féliciter de l'extraordinaire efficacité du dirigeant. "Il sait renvoyer l'ascenseur", entend-on à son sujet, il lui est même arrivé de faire du mécénat humanitaire pour aider certains présidents de club à boucler leurs fins de mois difficiles. Et sa société est toujours prompte à accueillir les membres de la "famille" en panne d'emplois.

 

Alors pourquoi aller chercher midi à quatorze heures? Darmon n'est même plus un prestataire, il est un partenaire obligé… Seuls Michel Platini et Bernard Tapie se seront opposés à lui: le premier réussira à l'écarter de l'organisation de la Coupe du monde 1998, préférant créer une structure marketing interne au comité d'organisation, le second ayant toujours refusé de travailler avec lui.

 

 

Fin de partie

En revanche, Darmon a manifestement été dépassé par le changement d'échelle accompli avec la croissance exponentielle du foot-business. Le tournant a paradoxalement lieu au moment de sa plus grande consécration, en 2001, lorsque sa société fusionne avec Sport+ (Vivendi-Canal+) et UFA Sports (Bertelsmann-RTL) pour fonder une major du marketing sportif (voir Droits sportifs, naissance d'un empire). La nouvelle entité postule au statut de numéro un mondial, et gère les intérêts de 320 clubs et 40 fédérations ou ligues nationales dans le seul secteur du football. À ce moment, les rivaux sont ISL-ISMM, en faillite, et Kirch, sur le point de l'être. Darmon, qui a touché 122 millions d'euros dans la transaction) savoure un "triomphe" total, la reconnaissance de son exceptionnel parcours. "Je suis comme un joueur très fort dans son club, qui est appelé en sélection nationale avant d'être intégré à la sélection mondiale (…) J'ai toujours su que j'arriverais au sommet. J'ai le niveau pour diriger une telle entreprise" déclare-t-il à L'Équipe (12 juillet 2001).

 

Président incontournable de la nouvelle entité, il n'en est toutefois plus que l'actionnaire minoritaire et doit s'adapter au fonctionnement d'une multinationale. A-t-il atteint son seuil de compétence ou est-il simplement victime d'une logique encore plus prosaïque que la sienne? Après une tentative d'alliance infructueuse avec Robert Louis-Dreyfus (repreneur de Kirch Sports) pour racheter la société — Canal+ souhaitant s'en désengager —, c'est le fonds d'investissements américain Advent International qui vient de parvenir à ses fins avec une proposition de 560 millions d'euros (Sportfive réalise 639 millions d'euros de chiffre d'affaires et emploie 340 salariés), contraignant Darmon à vendre ses 5% du capital à hauteur de 50 millions d'euros (RTL Group garde 25% des parts). En mars dernier, il entendait bien conserver ses fonctions de président, mais le nouvel actionnaire ne semble pas satisfait de son management et entend reprendre les choses en main.

 

Darmon doit aujourd'hui avaler la couleuvre de voir son ancien collaborateur et ennemi intime Alain Krzentowski prendre bientôt en main les destinées de Sportfive France. Il assurera jusqu'au 15 juillet une transition destinée tout autant à éviter les remous qu'à lui ménager une sortie honorable. Car l'homme, qui affiche volontiers son passé de "vendeur de cravates", semble écartelé entre une assurance sans limite et des complexes bien enracinés… Jean-Claude Darmon n'est pas fini, évidemment, ne serait-ce qu'en raison de la fortune considérable qu'il a constituée et de l'influence qu'il conserve au travers de ses réseaux. Mais en étant évincé de la société qu'il a créée et qui symbolisait sa réussite, il est brutalement privé de la substance même du pouvoir qu'il avait étendu sur le milieu du ballon rond. On lui prête l'intention de racheter le FC Nantes, ce qu'il a démenti. La boucle serait pourtant bouclée, puisqu'il retournerait ainsi sur les lieux où s'est amorcée son extraordinaire carrière. Darmon a peut-être perdu son empire, mais pas son destin… Le football français, lui, tourne une page de sa propre histoire.

Réactions

  • Thufir le 06/06/2004 à 18h36
    Hallucinant... Bon allez, z'avez raison, je suis un furieux parano...

    Allez, salut...

  • willy the pimp le 06/06/2004 à 18h37
    des preuves, je veux des preuves...

  • willy the pimp le 06/06/2004 à 18h37
    et réponds à mes questions si j'ai tort.

  • Dero le 06/06/2004 à 19h14
    Thufir (même si tu es parti, peut être liras-tu ce message), pourquoi est-il interdit de dire que Darmon est juif et qu'il aime le pouvoir ?

    A-t-on le droit de dire que tel gars, arabe, a arraché le sac d'une petite veille ou que tel autre, blanc, est un gros beauf qui boit son litron de rouge au bar ? Ou alors "non, c'est pas bien, ce sont d'affreux stéréotypes, c'est louche" ?

    Bref, je crois que tu cherches la merde là où elle n'est pas.

  • Queribus le 06/06/2004 à 22h16
    En fait, la nuit portant conseil, je choisis la réponse (a) : chute de cheveux !

    Et c'est mon dernier mot !

  • El mallorquin le 06/06/2004 à 23h20
    Ton problème Thufir, c'est que tu es visiblement le seul à voir (à vouloir ?) accolés les mots "juif" et "pouvoir occulte" dans cet article : et pour cause, ils ne le sont pas. Du coup, tu devrais peut-être t'interroger sur tes propres préjugés sur la communauté juive...

  • Thufir le 07/06/2004 à 00h35
    Euh, la palme pour toi, El Mallorquin ! Celle-là, on me l'avait jamais faite. Fallais oser !

  • Father Ted le 07/06/2004 à 01h45
    Thufir,

    Au vu de la controverse qui vous a opposé, j'ai rapidement relu l'article.
    La phrase qui fit l'objet de ton courroux semble être :
    "il est le neuvième enfant d'une famille juive pied-noir d'Oran"
    est-ce tout?
    Celle-ci est très brève, purement informative, et ne participe nullement d'une argumentation sournoise ou d'associations nauséabondes.
    Je vais m'efforcer d'expliciter quelque peu, en revenant sur les notions d'information, d'argumentation et d'association entre elles.
    Relisons cette phrase :
    "il est le neuvième enfant d'une famille juive pied-noir d'Oran"
    Il ne s'agit que d'une information parmi d'autres concernant les origines d'un homme.
    Si cela avait été le cas, nous aurions pu lire "il est le troisième enfant d'une famille musulmane de Karachi".
    Cela t'aurait il dérangé?
    On aurait pu également avoir "fils unique d'une famille de paysans du sud-ouest".
    Bref, le journaliste n'invente rien, il ne fait que donner une banale information sur les origines du personnage.
    Or il se trouve qu'il est issu d'une famille pied juive d'oran, et le journaliste le mentionne.
    Point.
    Si cela n'avait pas été le cas, il aurait alors pu écrire l'une des phrases ci-dessus.
    De plus, l'individu en question est habile en affaires ou dispose de réseaux occultes.
    Le journaliste l'explique, sans à aucun moment revenir sur les origines du personnage qui auraient fatalement impliqué cet état de fait.
    Il n'écrit pas, "tout petit déjà, son père juif lui apprenait à vendre 2 falafels pour le prix de 3", ce qui aurait alors pour le coup clairement pu participer d'un argumentaire douteux pour certains... ou représenter une information intéressante pour mieux appréhender le parcours du personnage pour d'autres.
    Dans le cas qui nous intéresse, ce problème ne se pose même pas, à aucun moment.
    Le journaliste aurait en d'autres circonstances tout aussi bien pu écrire l'article sans mentionner l'information relative aux origines de Darmond si cela n'aidait pas à la compréhension d'un sujet précis.
    Sauf que dans ce cas présent, retraçant son parcours, il est logique d'écrire une ligne sur ses origines (et une seule ligne!), ainsi que sur le fait qu'il est issu d'une famille de neuf enfants.
    Pour ma part, je retiendrais d'avantage le "neuf enfants" qui peut à la limite supposer que tout petit le Darmon a du s'imposer ou se faire son trou pour se faire entendre.
    Mais là encore, il ne s'agit que d'une pure spéculation.
    Tu es le seul jusqu'à présent, semble-t-il, à avoir déploré cette prétendue association inconsciente qui se serait opérée dans l'esprit du journaliste.
    Je ne nie pas que tu sois de bonne foi, mais si tu persistes à penser ainsi, je t'invite à aller sur les forums d'indymedia Paris traitant du sujet israélo-palestinien.
    Tu comprendras alors ce que peuvent être un amalgame ou un argumentaire douteux.
    Tu verras très souvent des gens aux prises avec leurs préjugés, sous l'emprise de la passion, incapables de prendre un quelconque recul, les uns tout aussi occupés que les autres à des dénonciations sans véritable fondement, car convaincus de défendre la cause juste.
    Certes, il nous faut être vigilant. C'est tout à ton honneur de dénoncer une probable dérive.
    Sauf que celle-ci n'existe pas dans le cas présent.
    Ce n'est pas parce que certains individus ont pratiqué ou pratiquent encore des amalgames douteux qu'il faut tomber dans l'excès inverse, à savoir voir le mal partout, la paranoïa étant le malheureux corollaire de certaines intolérances.
    A défaut de t'avoir convaincu (s'il en prend le temps, le journaliste le fera sans doute mieux
    tout seul), j'espère simplement t'avoir fait réfléchir.

  • peterelephanto le 07/06/2004 à 01h56
    Fut un temps où on parlait assez facilement et même parfois systématiquement de l'origine géographique, religieuse, sociale ou ethnique de quelqu'un. Untel était un ashkenaze, un juif polonais, un libanais, un pied noir , un rital des pouilles, un chinois ou un auvergnat, probablement parce qu'on considérait que cette origine pouvait éclairer le destin, la trajectoire d'une personne. D'ailleurs encore récemment j'ai forcément dû lire quelque part que Jospin ou Rocard sont protestants, sinon je ne le saurais pas. Et si je l'ai lu quelque part, c'est que quelqu'un a dû l'écrire en pensant que ça contribuait à éclairer la personnalité du sujet, sa weltanschauung comme qui dirait. Le Juif oranais renvoie peu ou prou à l'image d'un gars venu du soleil, un peu hâbleur et doué en affaires, très lié à la famille et affectivement possessif (la mère de bedos dans "nous irons tous...") mais aussi , plus tard, déraciné, bref toute l'imagerie véhiculée par les persos incarnés par Hanin ou Darmon (Gérard) dans les films d'Arcady.

    Evidemment le revers d'une telle présentation c'est qu'elle est susceptible de charrier un certain nombre de clichés, dont on peut s'emparer avec des intentions plus ou moins louables. Est-ce que Jean Claude Zahoui a changé de nom car c'est un infâme dissimulateur, ou plus prosaïquement comme beaucoup d'autres parce que les pieds noirs ont été très mal accueillis sur le continent?

    Le point est que la lutte contre le racisme (et aujourd'hui contre l'homophobie) se traduit d'abord depuis plusieurs années pour une grande part par une lutte contre l'expression de préjugés ou d'opinions pouvant être considérés comme racistes. C'est sans doute assez naturel mais -c'est un vaste débat- ça ne comporte pas forcément que des avantages. D'une part parce que, probablement loin d'avoir disparu, le racisme s'apparente à un iceberg dont la majeure partie est aujourd'hui dissimulée et silencieuse (ce qui ne veut pas dire qu'elle n'est pas opérante), d'autre part et surtout parce que les préjugés n'étant plus exprimés, ils ne sont plus discutés (faire comme si discutés était en italique). Or, difficile de réfuter quelque chose qui n'est plus dans l'espace de discussion.

    Enfin, cette propension -certainement légitime et de bonne foi- à prohiber systématiquement toute expression de ce qui pourrait être assimilable à un préjugé ou une catégorisation raciste, mène finalement à ce qu'on ne puisse plus dire grand chose, puisque même les références sans arrières-pensées à l'origine dont on parlait plus haut sont passibles de devenir suspectes, et cela encore plus dans des périodes où ces sujets sont hautement sensibles. La question devient d'ailleurs: peut-il exister une référence à l'origine qui soit sans arrière-pensée?

    La réponse se trouve sans doute dans l'intention (mais où est la touche "italique"?), sauf qu'une intention, c'est difficilement sondable.
    Bref, je ne suis pas du tout d'accord avec les conclusions de thufir, mais ce n'est pas pour ça que la question est sans intérêt, ou n'est pas révélatrice d'un certain malaise actuel de l'expression publique. Amha bien entendu.

  • tatayé le 07/06/2004 à 01h57
    Je suis heureux que d'autres cdfistes se soient joints au "débat" et je pense que l'on peut considérer qu'il se conclut au très sage post de Father Ted.

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