Faut-il de Raymond Domenech à Nantes souhaiter l'échec ?
Minichronique – L'arrivée de l'ancien sélectionneur de l'équipe de France à la tête du FC Nantes suscite indignation et sarcasmes. A-t-on raison d'espérer qu'il y échoue?
La minichronique pose une question, elle n'y répond pas toujours et, à la fin, elle en pose une autre.
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La nomination de Raymond Domenech comme entraîneur du FC Nantes semble lancer la chronique d'un fiasco annoncé, l'ultime épisode d'une ère Waldemar Kita marquée – entre autres – par une gestion sportive absurde ayant conduit à un divorce complet avec les supporters, les acteurs locaux et l'histoire même du club.
Le dernier troll du propriétaire des Canaris serait donc lui-même un troll, dont le destin serait de parachever l'incompétence présidentielle par son incompétence technique.
En outre, Domenech, en tant que président de l'Unecatef, a été en pointe de la défense de ce qui est perçu, non sans raison, comme la médiocrité corporatiste voire consanguine des entraîneurs français. On entend déjà de risibles plaidoyers en faveur du "personnage" et ceux le présentant comme la victime d'un délit de sale gueule.
Pour autant, faut-il miser sur son échec en assumant qu'il constituerait une sorte de leçon de morale?
Il faudrait déjà faire la part de l'incompétence postulée du nouveau coach et celle de la détestation qu'il nourrit, lesté de l'image accablante du fiasco de Knysna, deux ans après la demande en mariage de Zurich. Une image qu'il n'a pas particulièrement restaurée, depuis, en se transformant en polémiste médiatique.
Conformément à une tradition puissante en France, tous les arguments sont bons pour dézinguer un sélectionneur, quel qu'il soit. Du temps de Domenech, il y en avait beaucoup de très valables, mais ils étaient quand même noyés parmi d'autres complètement fallacieux.
On se souvient par exemple de Jean-Michel Larqué piquant une crise sur TF1 parce que c'était un ancien gardien (Bruno Martini) qui passait les consignes aux remplaçants. On a également peu considéré qu'il avait dû composer avec une génération faible (avant et après le retour des grands anciens) et ingérable.
Domenech n'était pas le pire technicien ou le pire tacticien de l'histoire: son principal problème a été sa totale perte de légitimité, en premier lieu auprès de son effectif. Après son absurde reconduction en 2008, il n'avait plus fait que de la politique et de la com, et ce fut un facteur majeur de l'explosion du groupe en 2010.
Cela sera son principal problème à Nantes. Il lui faudra quelque habileté pour convaincre ses joueurs qu'il n'est pas un tocard certifié et les faire adhérer à son projet. Cependant, il dispose de suffisamment de ficelles pour tourner l'hostilité à son profit, et sa tâche n'est pas insurmontable.
Reprendre en cours de saison une équipe qui flirte seulement avec la zone de relégation n'a rien d'une mission impossible: le "choc psychologique", la relance de certains joueurs, la remotivation d'un groupe sont autant de facteurs qui ont suffi, par le passé, à assurer un objectif sportif modeste – le maintien.
"L'espoir" assez vindicatif de le voir échouer risque donc d'être déçu. Même si la tentation est grande et son profil idéal, Domenech peut-il incarner à lui seul les turpitudes et les impasses du football français? En est-on au point où c'est tout ce qu'on peut "espérer" pour ce dernier?