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L'exclusion temporaire est-elle une (fausse) bonne idée ?

Minichronique - Le Board autorise l'expérimentation du "carton blanc", avec de bonnes intentions mais des conséquences encore une fois mal mesurées. 

Auteur : Jérôme Latta le 5 Dec 2023

 

La minichronique pose une question, elle n'y répond pas toujours et, à la fin, elle en pose une autre.

* * *

L'adoption à la hussarde de l'arbitrage vidéo, en 2018, a libéré une vague inédite de réécriture des lois du jeu, principalement afin de les adapter à la VAR en espérant (vainement) les "clarifier" ou les "simplifier". Cette vague de réformes a aussi favorisé l'adoption (sans plus de débat) de la refonte du temps additionnel et des cinq remplacements.

Ainsi l'Ifab vient-il de ressortir de ses cartons... le "carton blanc", exclusion temporaire de dix minutes, en autorisant son expérimentation [1]. L'enfer des fausses bonnes idées étant toujours pavé de bonnes intentions, celle-ci en est-elle une ?

 

 

Les intentions sont louables puisqu'il s'agirait de s'attaquer aux "protestations à l'encontre de l'arbitre" et aux "claires fautes tactiques". Cette plaie n'est pas nouvelle, et il faut rappeler que les réformes post-Mondiale 1990, marqué par les actes d'antijeu, avaient inclus la très bénéfique systématisation des cartons jaunes à leur encontre.

S'agissant "d'améliorer le comportement des joueurs", dixit l'Ifab pour justifier sa décision, on ne répétera jamais assez que le problème est culturel dans un sport qui tolère les contestations plus que tout autre et a fait du "réarbitrage" un fonds de commerce. Cet objectif était aussi celui de la VAR, pour le résultat inverse.

L'idée, également promue, de ne permettre qu'au capitaine de s'adresser à l'arbitre ne s'attaque elle aussi qu'aux symptômes. Quant à la sanction de l'antijeu, les avertissements n'y suffiraient plus ?

Les cartons jaunes ne seraient plus assez sévères, et les rouges trop. D'où le retour de cette vieille idée, de bon sens, qu'une sanction intermédiaire introduirait plus de souplesse et de justesse dans l'arbitrage, renforcerait l'autorité de l'homme ou la femme au sifflet.

Problème : avec un troisième niveau de sanction, on introduirait aussi une nouvelle responsabilité pour les arbitres, c'est-à-dire une nouvelle zone d'interprétation et donc un angle supplémentaire pour contester leurs décisions, de les comparer entre elles et d'alimenter leur procès. Non plus "Jaune ou rouge ?", mais "Jaune, blanc ou rouge ?"

Passons sur cette énième inspiration nord-américaine pour souligner que cette mesure s'inscrit encore dans la quête illusoire d'une "justice" absolue de l'arbitrage, ignorant que sa fonction première est que le jeu se poursuive - avec autant d'équité que possible, mais avec son lot d'injustices perçues.

Une exclusion de dix minutes aurait aussi pour effet de perturber les équilibres du jeu et la continuité du match, pas forcément en le rendant plus ouvert ni à l'avantage de l'équipe en supériorité numérique - même si cet ajout de désordre peut relever d'une volonté d'ajouter artificiellement un élément de "spectacle" (à l'instar des interventions de la VAR).

Comme lorsqu'on prône la diffusion des paroles des arbitres, la question se pose : faut-il "ajouter de l'arbitrage" - à la fois dans le jeu et dans son commentaire - pour des bénéfices incertains, sans soigner la maladie : l'obsession contemporaine, devenue pathologique, pour l'arbitrage ?

 

[1] L'UEFA a décliné cette possibilité, mais les instances françaises de l'arbitrage ont manifesté leur intérêt. La disposition est déjà appliquée au niveau amateur depuis 2018.

Réactions

  • La parole à la défense le 05/12/2023 à 15h22
    Personnellement, j'ai peur que l'exclusion temporaire ne donne lieu à des tentatives de gains de temps de l'équipe en infériorité. C'est déjà un peu le cas avec un carton rouge reçu pendant le match mais il est difficile de le faire trop longtemps.
    Quand on voit les 10 dernières minutes d'un match à enjeu avec une équipe gagnant seulement d'un but, on peut constater que, malheureusement, tout est fait par l'équipe défendant son avantage pour que le temps de jeu effectif soit le plus réduit possible. Je pense que ce serait la même chose pendant les 10mn du carton blanc.

    Et puis comment déterminer ces 10 minutes ?
    Le début ? Dès que le carton est sorti par l'arbitre ? Dès que le joueur a quitté le terrain ? Dès que le ballon est remis en jeu ?...
    La fin et le retour du joueur sur le terrain ? Dès la fin des 10mn ? Au 1er arrêt de jeu suivant ?...

    Bref, perso, je vote pour la fausse bonne idée.

    Une des plaies actuelles du foot pro me semble justement être les gains de temps et surtout les "blessures" touchant à 99,99% les joueurs de l'équipe en train de gagner et guérissant à 99,99% dès que l'arbitre indique qu'il faut quitter le terrain. Je n'ai pas de solution miracle à opposer à ce problème (demander systématiquement la sortie du joueur pour qu'il aille se faire soigner en-dehors du terrain ?) mais qu'est-ce que c'est pénible...

  • Pascal Amateur le 05/12/2023 à 19h12
    Je rappellerais pour ma part que dans un article ancien, M. Latta écrivait que — il s'agissait des premières expérimentations VAR — « il s’agit justement d’admettre que l’arbitrage est un travail d’interprétation qui impose de trancher des actions parfois indécidables en recourant à une gamme de sanctions limitée (carton rouge ou carton jaune, penalty ou pas, etc.) » L'ajout d'un carton blanc ajoute à la cacophonie l'illusion d'un « davantage décidable », en démontrant — qu'ils disent — qu'on pourrait aisément catégoriser la faute, l'acte d'anti-jeu, etc. Le délire est, comme pour globalement l'hérésie vidéo, de poser une lisibilité possible de cet indécidable, de cette interprétation nécessairement faillible. Je n'irai pas jusqu'à dire que c'est de la merdre — je suis trop poli pour ça —, mais enfin c'est complètement con, et c'est encore les arbitres qui vont s'en prendre plein la gueule, et les joueurs indirectement par un niveau de frustration de plus en plus élevé.

  • Milan de solitude le 06/12/2023 à 16h30
    L'ennui de ce raisonnement est qu'on se demande ce que tu aurais pensé de la création du carton jaune, l'instauration des juges de touche, etc.

  • Le Pobga du Coman le 06/12/2023 à 21h57
    Plutôt que d'appliquer (et d'expliquer) les règles, rajoutons-en.

    Ca marchera comment par rapport aux nombres de joueurs nécessaires sur la pelouse avant d'avoir match perdu d'ailleurs?

  • theviking le 07/12/2023 à 10h53
    L'idée semble bonne, mais comme La Parole, j'ai peur que ça implique que l'équipe qui est momentanément en infériorité ferme le jeu et le hache pendant ces 10 minutes, et que le joueur exclus temporairement revienne un peu plus frais.
    10 minutes, c'est peu en football pour profiter d'une supériorité numérique.

  • Romain Sallé le 07/12/2023 à 12h44
    Dans le foot amateur et notamment en jeunes où celà est appliqué, cela responsabilise les fauteurs de troubles (contestation, fautes dites tactiques). Du coup l'effet me semble bénéfique au niveau du "jeu".

    Après comme toute évolution, celà ne va pas éteindre les polémiques qui sont le lot de chaque sport et en particulier le foot. Il n'y a pas de recette miracle qui fasse l'unanimité, mais une évolution des règles d'un sport ne sont pas nécessairement néfaste en déplaisent aux conservateurs.

  • Bof le 07/12/2023 à 13h46
    Chronique intéressante, tout comme les commentaires qui suivent, qu'ils aillent dans le même sens ou non. Je lirai la suite de la conversation avec intérêt.

    Pour ma part, j'ai spontanément et naïvement eu envie de croire à une bonne idée, sans prendre le temps de réfléchir aux effets contre-productifs décrits ci-dessus à raison.

    Je souscris totalement à l'idée de "soigner l'obsession pathologique pour l'arbitrage" mais il me semble que cette préoccupation était surtout pertinente quand on l'opposait aux tenants de la VAR et leur fixette sur les HJ au millimètre, les situations de péno/papéno impossibles à trancher, etc.

    À la limite le problème des contestations sur le terrain n'est pas sans lien avec cette question, mais trouver des réponses plus dissuasives aux actes d'antijeu délibérés, ça me semble être encore un autre problème.

    Le problème des fautes tactiques ressemble un peu à celui du pollueur-payeur, la sanction est suffisamment faible pour que ça soit plus rentable d'enfreindre délibérément les règles dans une certaine mesure. Mais finalement, même une exclusion de 10 minutes pourrait encore être largement rentable en échange d'un tirage de maillot sur la ligne médiane annihilant un 2 contre 1.

    Peut-être qu'on pourrait, plus simplement et sans changer les lois du jeu, revoir les sanctions a posteriori (suspensions). On sait en psychologie que plus les conséquences d'un comportement sont éloignées dans le temps, moins elles ont de force pour infléchir ledit comportement (ce qui fait que je viens de manger un deuxième cookie, ou que la voisine d'en face va bientôt se griller une nouvelle clope). Le barème des 3 cartons en dix matches projette les joueurs dans une sanction trop lointaine, peut-être. En gros tu te tiens éventuellement à carreau une fois de temps en temps si tu ne veux vraiment pas louper le prochain match, que dis-je, le match d'après le prochain (jamais compris pourquoi c'était pas automatiquement le suivant comme pour un rouge, d'ailleurs). Un truc plus resserré serait peut-être plus efficace, genre suspension automatique après 2 cartons en 3 ou 4 matches (mais c'est peut-être excessif, je sais pas).

  • dugamaniac le 08/12/2023 à 22h36
    Je trouve que ça se tente.
    Et si ça ne marche pas, on arrêtera, comme pour le but en or ou autre.
    Sachant que ça existe dans pas mal de sport déjà, rugby, hand, hockey.

  • inamoto le 11/12/2023 à 14h32
    Merci pour la chronique.
    J'ai l'impression que la critique porte plus sur l'environnement de cette mesure que sur la mesure elle-même. En cela je suis à la fois d'accord (voilà qui viendra encore renforcer la passion nauséabonde du monde du foot pour le réarbitrage au détriment du jeu) et pas d'accord.
    Du point de vue de l'esprit du jeu, j'ai toujours trouvé la frontière trop forte entre un carton jaune à la portée souvent dérisoire et un rouge qui change le cours d'un match. C'est d'autant plus vrai dans le monde des 5 remplacements qui renforce la possibilité de coaching pour les joueurs avertis, et atténue encore la portée des avertissements. C'est également très vrai dans les fins de match où il vaut souvent mieux être averti "préventivement" que de laisser le jeu s'écouler. De ce point de vue certaines situations comme les fautes tactiques grossières ou les gains de temps manifestes me semblent mériter cette sanction intermédiaire.
    Je n'ai aucun doute sur la capacité du monde du football à transformer toutes les bonnes idées en plomb, mais dans un football idéal je trouverais cela une plutôt bonne idée.

  • Jamel Attal le 11/12/2023 à 16h21
    Merci pour les commentaires et les arguments (sauf le très court "yaka essayer" sans réfléchir avant : on a vu ce que ça avait donné avec la VAR et les règles nouvelles ou réécrites depuis). Depuis la publication de cette chronique, j'ai eu quelques débats par ailleurs, et me suis posé quelques questions sur l'application concrète de cette disposition.

    En particulier, j'ai regardé la première mi-temps de Montpellier-Lens vendredi, marquée par de grosses fautes et beaucoup de contestations, en tâchant d'imaginer à quels moments l'arbitre pourrait sortir le "carton blanc". Eh bien ça m'a définitivement convaincu que cette mesure s'avérerait contre-productive, voire inapplicable.

    On dit qu'il manque une "sanction intermédiaire" entre le jaune et le rouge. Mais en introduire une, ça compliquera la tâche des arbitres qui vont se trouver devant des dilemmes encore plus insolubles : on a toujours en tête des situations "pures", mais dans la réalité, il y a un continuum de situations très mal délimitées (qu'on peine à "catégoriser", comme le souligne Pascal). Déjà que les commentateurs passent leur temps à se demander si ça valait jaune ou rouge (péno pas péno, coup franc pas coup franc, etc), on va encore multiplier les occasions de couper les cheveux en quatre et de reprocher à l'arbitre qu'il n'a pas pris la meilleure décision – ça vaut pour les commentateurs comme pour tous les spectateurs et téléspectateurs.

    On parle de sanctionner les actes d'antijeu et les contestations. Je vais faire parler ma fibre répressive, mais le combo jaune-rouge me semble en réalité très efficace en matière de dissuasion, en particulier la menace du second jaune, justement en raison de l'effet couperet. À condition d'être ferme. Un tirage de maillot, ça devrait être jaune automatique (j'ai le sentiment que les arbitres sont plus laxistes et en laissent passer beaucoup), idem pour les contestations (cette fois en théorie, parce qu'on en est loin). Un joueur qui joue avec la marge étroite qui lui reste après un jaune joue au con : il n'y a pas de reproche de sévérité excessive qui tienne.

    Je doute ainsi de la fonction dissuasive d'une exclusion temporaire, outre son effet sur le jeu : son équipe va bétonner et casser le jeu et pourra s'en tirer sans grand dommage. Et je passe sur l'articulation des trois cartons, qu'il faudrait établir (quel cumul déterminera quelle sanction ?).

    Mais j'insiste : posez-vous devant un match lambda (dont vous ne supportez aucune équipe), et demandez-vous à quel moment un carton blanc devrait être sorti. Je suis à peu près sûr de l'effet pédagogique de cette expérience :)

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