Le bruit de la haine
En Italie, les groupes de supporters fascisants sont entrés en conflit ouvert avec les autorités du Calcio, le gouvernement et même leurs propres clubs...
Auteur : Jamel Attal
le 22 Fev 2000
En Italie, les groupes de supporters fascisants sont entrés en conflit ouvert avec les autorités du Calcio, le gouvernement et même leurs propres clubs. Le nouveau règlement de la Federcalcio a en effet récemment réaffirmé l'interdiction d'afficher dans les stades des bannières racistes ou incitant à la violence, en menaçant d'interrompre les matches et de sanctionner d'une défaite sur tapis vert les clubs concernés. Si les banderoles semblent avoir effectivement disparu, les supporters ont compensé en donnant de la voix : lors des deux dernières journées, Ba, N'Gotty, Thuram, Dabo, Lassissi ont eu droit à des grognements (de bêtes?) à chaque fois qu'ils touchaient le ballon. Cette attitude, parfaitement préméditée et soutenue par certains groupes de tifosi, est leur réponse en forme de provocation aux nouvelles mesures. C'est aussi une forme d'opposition systématique aux dirigeants de leurs clubs, qui menacent de leur refuser l'entrée des stades. Ces derniers sont d'ailleurs restés complaisants aussi longtemps que les manifestations les plus nauséabondes ne compromettaient pas trop l'image des clubs, laissant l'extrême-droite s'implanter tranquillement. Mais dès lors que ces comportements prennent des proportions excessives, que les autorités et les médias dénoncent les dérives, ils se convertissent (moins par conviction que par intérêt) à la lutte, histoire de ne pas trop compromettre les actionnaires.
Le plus grave semble bien qu'une banderole n'implique que la minorité supposée qui l'a confectionnée, alors que les chants et les huées explicitement racistes semblent repris par une large partie des tribunes, solidaire de la xénophobie de leurs leaders. Plutôt qu'un épiphénomène, ou le simple fait de quelques opportunistes habiles, le racisme ordinaire des stades italiens révèle aujourd'hui son implantation et sa banalisation. Le problème n'est pas nouveau, Aldaïr, Weah ou Desailly le connaissent depuis longtemps, il tient en partie à un rapport historique avec l'immigration très différent de celui de la France. Laquelle ferait quand même bien de tirer les leçons de l'exemple italien.